Humeur du jour!

Publié le par aveyronnaisedecoeur

Voila le début d'un roman que j'ai intitulé: "Orage pour un chanteur" Qu'est-ce que vous en pensez?


                                                             I

 

 

 

En ce vendredi soir de février, les maisons bien calfeutrées se serraient frileusement autour de l’église. Le monument aux morts, au milieu de la Gran’place, s’était habillé de givre. Les rares passants, emmitouflés dans de chauds manteaux, se hâtaient, suivis d’un nuage de vapeur sans cesse renouvelé par leur souffle : Castelnaujac a froid ! La ville frissonne sous les assauts de l’hiver.

Dans le centre, le Café des Sports, lieu de rendez-vous de toute la jeunesse, ne désemplit pas. C’était l’heure où, quel que soit le temps, chaque fin de semaine, les jeunes habitués se retrouvaient pour programmer leurs sorties.

Dans un coin, un peu en retrait, une silhouette féminine se penchait sur des livres. Perdue dans sa lecture, à mille lieux de là, le brouhaha incessant ne semblait pas l’affecter.

La porte s’ouvrit une fois encore et un grand jeune homme blond entra.

-         « Qu’est-ce qu’il fait froid ce soir ! Dit-il, en s’ébrouant bruyamment, au patron qui le salua et lui désigna, d’un geste de la tête, la jeune fille plongée dans ses bouquins.

-         Tu es en retard, commenta-t-il en souriant, il y a un bon moment que Nathalie est arrivée.

-         C’est elle qui est en avance, lui répondit l’adolescent avant d’aller la rejoindre. Salut Nat ! C’est la forme ? S’enquit-il. »

Prise par sa lecture elle ne répondit pas et une lueur amusée apparut dans le regard du garçon. Il sourit en hochant la tête tout en prenant place en face de son amie. Le contraste était frappant : s’ils étaient tous les deux grands et élancés, lui, arborait une tignasse indisciplinée, couleur des blés mûrs, qui auréolait son visage bronzé, aux pommettes saillantes, lui donnant l’air d’un enfant grandit trop vite. Ce manque de maturité était accentué par des traits flous, à peine esquissés et un regard d’azur voilé par de longs cils presque féminin. L’ensemble était agréable à regarder mais fade, sans personnalité. Elle, avait emprisonné ses longs cheveux noirs en deux tresses épaisses qui retombaient sur ses épaules, encadrant son visage fin, au menton volontaire, le rendant encore plus pâle par contraste. Lorsqu’il posa la main sur son bras et qu’il la secoua doucement, elle leva vers lui deux grands yeux presque aussi foncés que sa chevelure. La surprise se lisait sur ses traits mobiles.

-         « Hein ! Oh ! C’est toi Eric, excuse-moi, je révisais en t’attendant et…

-         C’est pour quand cet examen ? La coupa-t-il.

-         Dans cinq semaines. Plus cela approche, plus j’ai l’impression de ne plus rien savoir. Enfin ! Je pense que c’est normal. Tu as de la chance toi, tu n’as pas à te faire de soucis !

-         Oh ! Moi tu sais, l’équitation…c’est surtout un passe-temps alors les examens… je n’en ai rien à faire ! Tu prends quelques choses ?

-         Une pression.

-         Allez, laisse tomber tes bouquins, lui conseilla-t-il, tu n’as pas à t’inquiéter, tu seras la meilleure.

-         Si tu le dis ! S’exclama la jeune fille en riant.

-         J’en suis sûr, insista Eric tout en se retournant vers le serveur pour passer commande. »

Etouffant un bâillement Nathalie demanda à son compagnon :

-         « Où sont les autres ?

-         Nous sommes là ! S’écrièrent six jeunes gens en prenant place à leur table, qu’avez-vous décidé pour ce soir ?

-         Nous vous attendions, leur répondit Eric, que diriez-vous d’aller au cinéma, on joue… »

Pendant que son ami expliquait le programme de la soirée, la jeune fille laissa son regard vagabonder dans la salle du bar. Des prunelles aussi sombres que les siennes l’observaient depuis un bon moment, essayant de capter son attention.

-         « Qu’est-ce qu’il me veut celui-la ? S’interrogea-t-elle, remarquant enfin le manège de l’inconnu. »

C’était un homme d’une taille bien au-dessus de la moyenne avec des cheveux bruns assez courts sur le devant et descendant bas sur la nuque, recouvrant le col immaculé de sa chemise de boucles d’ébène. Ses épaules larges étaient mises en valeur par une veste noire, coupée prés du corps. Son visage mât, aux traits anguleux, était éclairé par un regard expressif. Elle avait l’impression de le connaître et cherchait où elle avait bien pu le rencontrer quand…

-         « Mais oui ! Se dit-elle, j’y suis ! Sa photo est sur tous les murs du pays, c’est Mike Storm, le chanteur qui donne un gala, ce soir même, sous le chapiteau dressé au stadium. Qu’est-ce qu’il fait là ? Le spectacle a lieu tout à l’heure… En tout cas, il ne manque pas d’audace, il me fait signe de venir ! Non mais, pour qui me prend-il ? »

 Une flamme s'alluma dans ses yeux les embrasant d'une lueur métallique. Foudroyant l'insolent du regard elle se retourna vers ses amis.

-         « Alors, vous vous êtes mis d'accord ? Leur demanda-t-elle d'une voix qu'elle voulait normale. »

Avant qu'ils ne lui répondent, une main se posa sur son épaule.

-         « Puis-je vous parler un instant, mademoiselle ? Dit une voix chaude et teintée d'un léger accent indéfinissable.

-         A quel sujet ?

-         Juste une minute, insista l'homme aux yeux noirs. S'il vous plaît. »

Nathalie regarda ses amis qui les observaient, intrigués. Eric lui sourit et dit, en haussant les épaules :

-         « Reviens vite, nous t'attendons. »

Le regard étincelant, elle se leva d'un mouvement rageur et suivit le chanteur.

-         « Je n'apprécie pas ces manières, monsieur, articula-t-elle difficilement en s'asseyant à sa table. Pour qui vous prenez-vous ? Ou plutôt, pour qui Me prenez-vous ? Ce n'est pas parce que vous êtes une vedette connue qu'il faut vous croire tout permis ou penser que tout le monde est à vos ordres. Je ne fais pas partie de ces fans hystériques prêts à tout pour pouvoir vous approcher. Je suis avec des amis et nous partons finir la soirée ailleurs, je n'ai pas de temps à perdre avec une star en mal de compagnie. Pour votre gouverne, il n'est même pas question d'assister à votre gala. Vous voyez, nous n'avons rien à nous dire. Bonsoir. »

Une poigne de fer la retint au moment où elle allait s'éloigner.

-         « Allons, allons, jeune fille, calmez-vous et asseyez-vous un instant. S'il vous plaît… je désire seulement échanger quelques mots, insista-t-il.

-         Je suis certaine que vous pouvez trouver des dizaines d'autres filles qui se feraient un plaisir d'écouter vos fadaises, railla-t-elle. Pour quoi perdre votre temps à vouloir discuter avec quelqu'un qui ne veut rien avoir à faire avec vous ?

-         Voyez-vous, cela fait un moment que je vous observe, dit le chanteur, et vous m'intriguez. Je vous assure, plaida-t-il devant sa moue sceptique, je trouve surprenant de voir une jeune et jolie fille comme vous plongée dans des livres, un samedi soir, quand elle ne devrait songer qu'à s'amuser.

-         Je viens de vous dire que je m'apprêtais à sortir avec mes amis. Nous…

-         Laissez-moi finir ! La coupa-t-il. Je sais que vous prétendez être sur le point d'aller quelque part avec les jeunes gens qui sont là-bas mais j'ai bien vu que cela n'avait pas l'air de vous enthousiasmer outre mesure. Vous préparez un examen ?

-         Cela vous intéresse vraiment ?

-         Si je vous le demande ! C'est un secret ? Fit-il, amusé.

-         Bien sur que non ! Je vais passer le deuxième degré d'équitation.

-         C'est dur ?

-         Ce n'est pas que ce soit réellement difficile, c'est qu'il y a tant de chose à étudier et à savoir par cœur que…on ne peut pas dire que la théorie soit ma tasse de thé ! Je préfère la pratique.

-         Et vous êtes bonne ?

-         Je me défends. Vous êtes satisfait ? Je peux partir ?

-         Tout à fait, répondit le chanteur faisant comme s'il n'avait pas entendu la seconde partie de la question. Je résume : vous êtes sur le point de passer une épreuve importante, si importante que tous vos temps libres sont pris par vos révisions, vous vous préparez à terminer cette soirée au cinéma bien que cette perspective n'ai pas l'air de vous enthousiasmer beaucoup et surtout, surtout… vous aimeriez être ailleurs qu'en face de moi ! Je me trompe ? »

Nathalie le regarda interloquée. L'humour de cet homme commençait à l'amuser.

-         « Eh ! Bien vous alors… vous êtes incroyable ! S'exclama la jeune fille un sourire dans la voix. Puisque vous avez tout compris, ajouta-t-elle ironique, vous concevrez aisément que je vous quitte !

-         Pas si vite, l'arrêta-t-il, vous avez bien encore quelques minutes, nous n'avons pas vraiment fait connaissance.

-         Je n'en ai peut-être pas envie.

-         Mais moi si. Vous m'intriguez de plus en plus. Comme vous me l'avez fait remarquer, bien d'autres de vos consoeurs seraient heureuses que je veuille de leur compagnie !

-         Ca c'est sur ! S'exclama Nathalie.

-         Pourquoi pas vous ? Pourquoi êtes-vous si méfiante, si agressive ?

-         Parce que vous n’êtes qu’un étranger et… un chanteur !

-         Dans votre bouche ce mot sonne comme une injure ! S'exclama–t-il, Expliquez-vous.

-         Je n'ai pas besoin de vous faire un dessin… tout le monde sait bien que vous les artistes… c'est comme les marins… une femme dans chaque port !

-         Vous exagérez un peu, non ?

-         Si peu ! Je ne pense pas avoir une vue des choses tellement fausse.

-         Vous êtes dure ! Je ne suis qu'un homme qui a rencontré une jeune fille qui lui plaît et qui a envie d'en savoir plus sur elle, c'est tout.

-         C'est tout ? Releva la jeune fille d'un ton sceptique.

-         Presque. Puisque ce film ne vous emballe pas, et que vous devez vous détendre en ce début de week-end pour oublier votre anxiété, permettez-moi de vous proposer un autre choix. Que diriez-vous si je vous invitais à voir mon show ?

-         Je vous ai dit…commença-t-elle.

-         Je sais ! la coupa-t-il. Vous n'aimez pas ce que je fais ?

-         Si, beaucoup, avoua-t-elle à contre cœur.

-         Vous préférez le film ?

-         Bof ! Pour être honnête, vous avez raison, il ne m'emballe pas.

-         Alors, dîtes oui.

-         Oh vous ! Vous êtes exaspérant ! Je ne sais pas si je dois vous envoyer votre verre à la figure ou rire de votre obstination, s'exclama la jeune fille.

-         Et si tout simplement vous acceptiez ? Lui rétorqua le chanteur en mettant prudemment son verre hors de portée.

-         Pourquoi moi ?

-         Je vous l’ai déjà dit : vous me plaisez et vous m’intriguez assez pour que j’aie envie de vous connaître un peu mieux. Dites-moi oui, cela ne vous engage à rien, juste à assister à mon tour de chant. Allez…s’il vous plaît ! »

Nathalie ne répondit pas. Elle le fixait d’un air moqueur, un sourire teinté d’ironie aux lèvres.

-         « C’est oui ? Insista Storm, jouant de sa voix chaude.

-         Vous êtes têtu vous ! C’est vrai que c’est tentant…vous invitez mes amis aussi ? Railla-t-elle.

-         Si vous le désirez. Ce sera à contre cœur mais… je le ferais s’il n’y a que ce seul moyen pour vous faire venir mais… à une condition…

-         Laquelle ?

-         Vous acceptez de partager mon souper après le spectacle. Vous seule bien sur !

-         Je…

-         Ne le prenez pas mal, la coupa-t-il hâtivement, c’est une proposition honnête. J’ai juste envie d’en savoir un peu plus sur vous. »

Nathalie laissa fuser un rire léger et frais.

-         « Je vous donne ma réponse dans un instant, le temps de demander aux autres si votre proposition les intéresse. »

Elle commençait à s’éloigner quand, soudain, elle se retourna.

-         « Au fait, moi c’est Nathalie, l’informa-t-elle en lui tendant la main, Nat pour les amis.

-         Moi, c’est Michaël, dit le chanteur en répondant à son geste, mais tout le monde m’appelle Mike. »

La jeune fille rejoignit ses amis et discuta quelques instants avec eux avant de retourner avec Storm.

-         « C’est d’accord, lui annonça-t-elle, nous acceptons votre invitation.

-         J’en suis ravi. Vous n’aurez qu’à vous faire connaître à l’entrée et on vous remettra vos billets. Soyez à l’heure, ajouta-t-il en se levant.

-         N’ayez crainte, le temps de nous changer et… nous serons là pour vous applaudir. »

Mike lui posa la main sur le bras.

-         « Ce soir, je ne chanterai que pour vous.

-         Que faites-vous des quelques centaines de fans venus vous voir ?

-         Je ne les verrai même pas ! »

La jeune fille laissa fuser un rire joyeux.

-         « Vous racontez combien de fois par jour ce genre de fable ?

-         Vous êtes dure avec moi ! Vous pourriez au moins me laisser l’illusion que vous me croyez. »

Il resta un instant à regarder la flamme moqueuse qui brillait dans les yeux de sa compagne.

-          « Je suis heureux que vous ayez accepté. A tout à l’heure.

-         A tout à l’heure. E t… merci. »

A cet instant, leurs regards se rencontrèrent, se racontèrent tout ce qu’ils n’osaient pas encore s’avouer, se perdant… Instant magique où le temps semble s’arrêter, où la vie elle-même est mise entre parenthèses, où rien n’existe sauf deux cœurs qui battent à l’unisson, heureux de s’être enfin trouvés.


A suivre!!!!!

En attendant n'oubliez pas:   
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article